Rhône-Alpes, une certaine idée de la francophonie

À travers cette contribution, les représentants de la société civile organisée rhônalpine veulent mettre en avant une autre idée de la francophonie. Cette contribution a précédé les 1ers États généraux de la Francophonie décentralisée qui ont eu lieu les 26 et 27 octobre dernier. Organisés à l’initiative de l’AIRF et l’AIMF, ils ont mobilisé près de 400 représentants issus de collectivités locales francophones.Téléchargez la publication 

EXTRAIT : L’implication des partenaires sociaux et organisations professionnelles dans la francophonie 

3.2.1 Promouvoir la dimension sociale de la mondialisation et les droits de l’Homme 

Comme nous l’avons souligné, les ONG contribuent largement au renforcement des coopérations francophones notamment dans le champ de la promotion des droits de l’Homme et de la construction de la dimension sociale de la mondialisation. De nombreuses ONG ont ainsi été accréditées auprès de l’OIF15. Les instances intersyndicales francophones, elles aussi, jouent un rôle important dans ce sens à travers la promotion des droits syndicaux et du dialogue social. 

L’article 23 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme a inscrit le droit de toute personne « de fonder avec d'autres des syndicats et de s'affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts ». Ce droit concoure, au travers du renforcement du dialogue social dans les différents pays, à la promotion de la dimension sociale de la mondialisation, affirmant un principe simple « où l'économie ne peut pas se faire contre les salariés » 16. Les réseaux syndicaux internationaux contribuent en premier lieu au respect des droits fondamentaux au travail et l’application des normes internationales du travail. Ils permettent de plus de construire une meilleure convergence entre les systèmes de protections sociales et limitent le risque de dumping social tout en restant soucieux de justice sociale et d'équité, de développement économique harmonieux et de préservation de l'environnement. Les partenaires sociaux se sont, depuis de nombreuses années pleinement inscrits dans la mondialisation et ont tissé d’importants réseaux internationaux17, notamment francophones. Ils ont pu nouer des liens dans de nombreux pays, y compris dans des territoires où le contexte politique freine les coopérations (exemples cités par les syndicalistes auditionnés : Algérie, Palestine, Liban, Turquie,…) et apparaissent comme des partenaires clés. 
 

3.2.2 Défendre la langue française et le multilinguisme dans l’entreprise. 

La question des langues dans l’entreprise mobilise aujourd’hui l’ensemble des partenaires sociaux. L’aspiration contemporaine à une langue unique est relayée, en France, tant par les sphères politiques qu’économiques. Pourtant, l’apologie d’une langue unique, universelle, favorisant le dialogue entre les peuples, conduit à ignorer l’importance culturelle des langues et le pouvoir normatif qu’elles comportent. 

En France, la loi TOUBON est protectrice et le droit du travail tient ainsi compte de la nécessité du plurilinguisme. Cependant les syndicats dénoncent un recours de plus en plus fréquent « au tout anglais » dans l’entreprise18. Le collectif intersyndical pour le droit de travailler en français en France créé en 2007 réunissant la CFECGC, la CFTC, la CGT et l'UNSA a dénoncé la réalité du transfert linguistique qui se résumerait aujourd'hui au tout anglais et à sa promotion. 

Nous avons pu observer à travers certaines de nos auditions qu'un recours au tout anglais dans l’entreprise pouvait être source de souffrance au travail notamment chez les plus âgés, mais aussi chez les jeunes. Un sondage réalisé par Opinionway19, en mars 2009, montre que 25 % des cadres interrogés se plaignent d'être contraints de travailler régulièrement dans une langue qui n'est pas leur langue maternelle. Ces difficultés demeurent bien souvent cachées et ne sont pas suffisamment prises en compte. L’obligation faite aux entreprises de présenter des notices techniques dans la langue du pays n’est pas toujours respectée et ceci a pu occasionner des accidents. L’enjeu principal est donc l’application et la défense de la loi. Il semble ainsi important, dans l’esprit du projet de loi Marini/Legendre20, d’inciter les entreprises à bien prendre en compte et traduire les enjeux liés à l’usage des langues dans l’entreprise (alphabétisation, apprentissage des langues, mise en place de commissions de francisation,…), en intégrant notamment une rubrique sur cette question dans le bilan social annuel. 

Les partenaires sociaux apparaissent ainsi à plus d’un titre comme des acteurs majeurs dans la construction de la francophonie, aux côtés des ONG. Les organisations professionnelles peuvent aussi contribuer au renforcement de coopérations à caractère économique en francophonie. Or cet enjeu s’affirme comme majeur pour l’avenir. 

15 Avocats sans frontières, Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH), Fondation Nicolas Hulot pour la nature et les droits de l’Homme (FNH), Organisation mondiale contre la torture (OMCT), Reporters sans frontières (RSF), Union internationale de la presse francophone (UPF), etc. 
16 Jacques DERMAGNE, Président du CESE, revue « Le mérite » nº 124. 
17 Voir annexe 4. 
18 Création d'un site langue du travail réalisé avec la confédération Générale du Travail et la Fédération des Travailleurs du Québec pour proposer une alternative au tout anglais. 
19 Sondage réalisé à la demande de la CFE CGC dans le cadre de son baromètre du stress (www.cfecgc.org/ewb_pages/b/barometrestress.php) sur la période du 3 au 11 mars 2009 auprès d'un échantillonnage représentatif de la population des cadres actifs français de 1052 personnes.