AILLEURS DANS LA FRANCOPHONIE
BLOGUE - Le rêve d'une université franco-ontarienne en Ontario est-il encore vivant?
Pas de doute, si on se fie aux commentaires entendus en fin de semaine dernière aux États généraux sur l'éducation postsecondaire en français, qui se tenaient à Toronto. Il y a un consensus. Les francophones veulent leur université, en briques et mortier. Pas d'une autre université bilingue. Ils veulent d'un établissement où ils auront le sentiment de faire partie de la communauté francophone. « Il faut se sentir chez nous », avons-nous pu entendre.
Mais le rêve d'une université franco-ontarienne est-il seulement réaliste? Plus ou moins à court terme si on se fie aux réponses de la ministre déléguée aux Affaires francophones Madeleine Meilleur et de la première ministre Kathleen Wynne. Elles se montrent certainement ouvertes. Mais toujours pas d'engagement formel.
Il n'y a, par exemple, aucune mention directe d'une future université franco-ontarienne dans les lettres de mandat qui ont été envoyées par la première ministre à la fin septembre à ses ministres. Ces lettres contiennent toutes les attentes et priorités de Kathleen Wynne pour chaque ministre.
À la ministre Meilleur, Kathleen Wynne écrit qu'elle devra « envisager les options visant à accroître l'accès à des programmes postsecondaires de langue française en Ontario ». À Reza Moridi, ministre de la Formation et des Collèges et Universités, elle lui demande de « continuer à reconnaître et à combler les besoins des divers groupes d'apprenants, dont la communauté franco-ontarienne ».
On est loin d'une université franco-ontarienne en chair et en os. Est-ce que Madeleine Meilleur et Reza Moridi seront de la première pelletée de terre d'une éventuelle université franco-ontarienne? À voir...
Surtout dans un contexte de restrictions budgétaires avec un déficit prévu cette année de 12,5 milliards de dollars. Il est aussi écrit dans les lettres de mandat : « nous ferons preuve de prudence financière ». On n'entend pas encore les marteaux piqueurs. La brique et le mortier, ça coûte cher.
Mais le gouvernement Wynne sait qu'il ne peut pas ignorer les francophones. Ce sont 600 000 personnes réparties aux quatre coins de la province. Qui ont des besoins, des revendications et des attentes. Dans la région d'Ottawa où on retrouve évidemment beaucoup de francophones, tous les députés sont libéraux : Marie-France Lalonde, Madeleine Meilleur, Yasir Naqvi, Bob Chiarelli, John Fraser. Les libéraux souhaitent que ça se poursuive.
Et des francophones commencent à être impatients. Ça fait des années qu'ils revendiquent une université gouvernée PAR et POUR les Franco-Ontariens. Déjà en 2012, le Commissaire aux services en français, François Boileau, allait jusqu'à dire que l'avenir des Franco-Ontariens était en jeu en raison du faible éventail de programmes d'études postsecondaires pour les francophones dans le centre-sud-ouest de la province. Bon nombre de Franco-Ontariens étudient en anglais faute d'obtenir un enseignement dans leur langue. En janvier 2013, un comité d'experts formé par la province suggérait la création d'un établissement d'enseignement de langue française.
Le Commissaire Boileau le disait en fin de semaine dernière : « c'est maintenant à la partie gouvernementale de s'engager avec cette communauté qui veut quelque chose qui lui ressemble ».
Mais la balle est aussi dans le camp de la communauté franco-ontarienne. Les délégués qui participaient à ces États généraux à Toronto ne se sont pas entendus sur le modèle à adopter pour créer cette université de langue française. Et tout indique que si le gouvernement allait de l'avant avec une telle université, la suite de la discussion porterait sur le lieu de cet établissement. L'avocat Ronald Caza, très impliqué dans la francophonie, disait récemment que tout le monde se rallierait au bout du compte. Mais on peut penser que chacun voudrait voir cette université dans son coin de la province. Et c'est une vaste province.
En juin, Kathleen Wynne évoquait la possibilité de créer une université virtuelle pour les francophones. Un ballon d'essai pour tester les eaux? Peut-être.
Ce serait surtout beaucoup moins cher qu'un édifice en tant que tel et ça n'aurait pas le désavantage d'avoir pignon sur rue dans une région plus qu'une autre. Mais est-ce suffisant pour assouvir le rêve? La communauté n'en est toujours pas convaincue.